On parle d’elles

Une petite vidéo sur Anne de Jean-Christophe Pratt

Un article réalisé par Leïla Pelletier:

Anne Boutin Coutin  a commencé sa formation artistique par l’apprentissage des techniques de tissage dans les pays scandinaves. Cette attirance pour le travail manuel et l’emploi de matériaux naturels, de fibres végétales et animales est l’essence même du développement de son travail depuis une quinzaine d’années. Sa sensibilité à la nature et son attachement aux formes organisées, évolutives et élégantes de la nature ont nourri son inventivité. Elle transpose, brode, interprète avec bonheur aussi bien sur le monde aquatique et aérien qu’elle ne s’inspire de la fermentation lourde, bourgeonnante, inquiétante ou lyrique de la terre. La pratique du land art ne pouvait que lui convenir et elle a su y développer en plus de la qualité plastique de son travail une charge poétique très personnelle. Ces qualités se retrouvent différemment agencées dans des œuvres présentées dans l’espace plus intime des salles d’expositions. Dans cette dernière configuration, le dispositif de présentation utilise aussi bien des espaces ouverts pour des pièces posées au sol ou suspendues que l’espace plus intimiste voire minimaliste d’un tiroir, d’une ampoule ou d’un flacon.

Ce qui rend son travail particulièrement attachant hormis ses qualités plastiques c’est qu’il révèle au regardeur une expérience du monde qui va au delà du simple sentiment convenu, romantique ou pas, de la nature. La représentation chez elle est irréductible à l’objet et à sa reconnaissance formelle, ceci est particulièrement sensible dans ses installations de plein air. Elle conçoit des voilages végétaux graphiquement inventifs aux motifs spiralés de tiges d’ortie, des rideaux bayadères rythmiquement savants en queues de cerise, en aiguilles de pin, des rideaux occultants ou résillés en feuillages tressés ou agrafés feuille à feuille d’une épine afin de vous révéler sous le frémissement du vent et le gonflement soudain du temps et de l’espace, un peu plus de la profondeur du monde.

Anne Boutin Coutin est une artiste sincère, c’est pourquoi il lui arrive de laisser paraître des traces autobiographiques dans son œuvre, sans lourdeur aucune car elle vit parfois avec les fées. Elle confectionne pour elles des lits d’apparat garnis de courte pointe en coquelicots et d’un oreiller en mousse des bois ourlé d’une dentelle de lichen. Elle-même s’y repose avant de broder des contes de Perrault en de délicats palimpsestes sur des bonnets d’enfant plein de rêves sourds. Elle sait aussi pour des spectacles chorégraphiques confectionner de vraies robes rien qu’avec des mots…Son enfance c’est aussi un père entomologiste qui lui a communiqué la passion des papillons dont elle se sert pour dynamiser l’espace. Sous ses doigts, ces fragiles lépidoptères en nuées jaillissent de valises entrouvertes, colonisent en spirales palpitantes les cages d’escaliers et soulignent sans pathos la respiration imperceptible de l’arbre.

Bon, je n’en dirai pas plus. Mais, je suis sûr déjà que vous demanderez à voir !

J.K